Comment choisir un moteur électrique : performance, technologies & impact environnemental

Avec l’explosion de la mobilité électrique, il est urgent que chaque usager et chaque concepteur développe des connaissances solides sur le moteur électrique. Ça tombe bien, cet article a été créé pour ce but précis.

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Julien Vaïssette, ingénieur en mécanique

Aujourd’hui, toute personne qui souhaite se procurer un véhicule électrique doit impérativement développer des connaissances solides autour du moteur électrique.

Pourquoi impérativement ?

Car lorsque vous vous rendez sur la page de vente d’un véhicule thermique, vous voyez toujours apparaître les spécificités du moteur thermique qui le compose.

Si c’est un 3 cylindres, un moteur atmosphérique ou que sais-je encore, vous pouvez trouver facilement l’information.

Eh bien dans la mobilité électrique, ce n’est pas le cas.

Si vous voulez connaître la technologie des moteurs électriques qui propulsent une Tesla, vous devez fouiller leur site de fond en comble pour trouver le guide du propriétaire. Et encore, Tesla fait partie des meilleurs élèves car certains constructeurs se passent même de donner l’information.

Elle n’est même pas cachée, elle n’est simplement pas communiquée.

Et ça, aussi inadmissible que ça puisse être, c’est aussi de la responsabilité de l’usager : si nous nous y connaissions mieux en moteurs électriques, nous saurions qu’il existe de nombreuses technologies et variations de moteurs électriques.

Nous exigerions alors que les constructeurs nous en disent un peu plus.

Pour cause, si Renault ne donnait aucune information sur le moteur de sa Clio, de nombreux automobilistes feraient blocus pour forcer Renault à les considérer autrement que comme des vaches à lait. Pourquoi n’est-ce pas le cas dans la mobilité électrique alors ?

Attention, je ne vous conseille évidemment pas de faire blocus contre les véhicules électriques.

Il faudrait être fou pour vous prodiguer un tel conseil, car l’adoption massive des véhicules électriques est hautement nécessaire. Mais je commence à perdre patience face aux constructeurs de véhicules électriques qui oublient de vous prendre au sérieux.

Je vais donc faire de mon mieux pour vous aider à y voir un peu plus clair dans la jungle des moteurs électriques, afin de vous armer un peu mieux face aux constructeurs dont l’opacité frise le légendaire.

Nous allons tout étudier dans cet article :

  • en partant des notions les plus simples et accessibles du fonctionnement des moteurs électriques,
  • nous allons décortiquer les différentes technologies de moteurs électriques,
  • et nous allons lever le voile sur leur impact environnemental.

Votre avis : la présence de terres rares dans les moteurs de véhicules électriques

Les terres rares sont dans (presque) tous les moteurs électriques : les moteurs de Tesla, les moteurs de motos électriques, et même les moteurs de vélos électriques.

Et pour comprendre l’ampleur du phénomène, j’ai lu énormément de littérature scientifique sur le sujet.

Le problème, c’est qu’aucune de ces analyses et études scientifique ne prend en compte l’avis des personnes les plus concernées par le sujet des terres rares : vous et moi, les usagers, automobilistes et motards.

Alors j’aimerais savoir ce que vous pensez des terres rares.

J’ai préparé un questionnaire très court (5 questions), qui vous prendra probablement moins de 2 minutes à compléter.

Vous pouvez y répondre en cliquant sur ce bouton :


Grâce à vos réponses, j’aurai une idée claire de ce que vous pensez des terres rares – et je pourrai m’appuyer là-dessus pour continuer la conception de mon prototype de moto électrique.

thomas edison moteur electrique © jean charles barbe

Comment fonctionne un moteur électrique ?

Tous les moteurs électriques fonctionnent sur le même principe : une pièce cylindrique (le rotor) tourne dans ou autour d’une autre pièce cylindrique (le stator) grâce à la génération d’un champ magnétique tournant.

En réalité, ce principe exclut les moteurs électriques linéaires : ils ne tournent pas, puisqu’ils coulissent.

Mais disons que nous ne parlerons ici que des moteurs électriques rotatifs. On a déjà bien assez de candidats avec ceux-là, alors on mettra de côté les moteurs linéaires. Et puis en mobilité électrique, on ne croise aucun moteur électrique linéaire.

Qu’à cela ne tienne, concentrons-nous donc sur les moteurs électriques rotatifs.

Et voyons plus en détails comment ils fonctionnent.

Ici, je vais procéder graduellement. Si vous connaissez déjà le fonctionnement générique d’un moteur électrique, vous pouvez cliquer sur le sommaire (juste au-dessus) pour aller directement à la prochaine partie, sur les différentes technologies des moteurs électriques.

Et si vous êtes toujours là, je vous propose de discuter du point commun de quasiment tous les moteurs électriques : la force d’attraction magnétique.

Utiliser l’attraction et la répulsion magnétique dans le moteur électrique

L’attraction magnétique nous a tous fascinés lorsqu’on était enfants.

En jouant avec deux aimants, nous avons tous été intrigués par 2 caractéristiques quasiment miraculeuses qu’on ressentait entre nos doigts :

  • L’attraction magnétique n’a pas besoin de contact entre les éléments – on peut faire bouger un aimant sans le toucher, en déplaçant un autre aimant ;
  • Et elle est irrésistible – si l’aimant est assez proche, l’attraction (ou la répulsion) magnétique attirera (ou repoussera) forcément l’autre aimant.

Face à ces 2 propriétés, une idée a forcément germé dans votre imaginaire d’enfant lorsque vous jouiez avec ces deux aimants. Cette idée, c’était de guider un aimant à distance, grâce à un autre aimant.

Et aujourd’hui, je vous propose de faire de même.

Mais cette fois, notre objectif ne sera pas seulement de guider un aimant grâce à un autre aimant.

Ça va être de le faire tourner, comme dans un moteur électrique.

Pour y arriver, fixons un aimant de manière à lui laisser la liberté de tourner sur lui-même, en l’empêchant de se déplacer dans d’autres directions. Ensuite, approchons un autre aimant, à une distance pour laquelle l’aimant placé au centre salive d’appétit.

rotation des aimants dans un moteur électrique

Le petit aimant que nous approchons du cercle présente ostensiblement son pôle nord à l’aimant du milieu.

Ce dernier, par l’odeur alléché, tend son pôle sud autant qu’il le peut vers le petit aimant. Il tend le cou, désespérément. Il n’a qu’une envie : dévorer l’aimant qu’on lui tend.

Manque de chance, nous sommes taquins.

Et nous déplaçons le petit aimant autour du cercle gris.

L’aimant du milieu ne peut se résoudre à quitter des yeux l’aimant que nous lui présentons. Il le suit alors avec une docilité honteuse.

C’est gagné, nous venons de redécouvrir le principe du moteur électrique. C’est un aimant qui tourne autour d’un autre aimant pour le faire tourner.

Facile, non ?

Pas si vite.

Si on en reste là, l’intérêt est assez faible : pour faire tourner l’aimant du milieu, on doit faire tourner autour de lui un autre aimant. Mais cet autre aimant ne tourne pas par miracle : il a lui aussi besoin d’un mécanisme pour le faire tourner.

Autrement dit, on a besoin d’un moteur qui fasse tourner l’aimant de l’extérieur, afin de faire tourner l’aimant de l’intérieur.

Pas très malin.

Nous, ce qu’on veut, c’est que notre moteur tourne sans nécessiter d’intervention mécanique extérieure. Alors voyons ce qu’on peut faire.

Le rôle du rotor et du stator dans un moteur électrique

Sortons un schéma simplifié de la moto électrique que je fabrique en ce moment, pour y voir plus clair.

Je tiens au passage à vous rappeler que vous pouvez suivre la conception de ma moto électrique, grâce à mon journal de bord.

Vous y trouverez les choix de technologies que j’ai faits, les péripéties que j’ai traversées et les leçons que j’en ai tirées pour mon premier prototype. Je crois qu’aucun constructeur ne fait ça, alors j’espère que ça vous plaira.

Note : après 3 ans de travail & une conception aboutie de mon premier prototype de moto électrique, j’ai décidé de stopper mon journal de bord. Vous pouvez néanmoins retrouver les archives de ce journal de bord en cliquant ici.

Dans le châssis de ma preuve de concept, vous pouviez retrouver un vide béant pour y intégrer le moteur électrique. L’idée de ce vide est simple : je voulais fixer le moteur électrique à l’endroit prévu à cet effet. Il me suffisait donc de visser le moteur sur le châssis.

Facile.

Faisons ça, ici même.

schéma simplifié moto

Très bien.

Il est tout beau, tout neuf.

Mais pour l’instant, il ressemble plus à une brique qu’à un moteur, car il ne bouge pas d’un pouce.

Or personne ne veut d’une brique comme moteur. Alors je vous propose de remplacer cette masse inerte par un vrai moteur électrique, composé deux corps :

  • Une partie fixée au châssis, que nous appellerons « stator ». Car elle est statique. CQFD.
  • Et une partie qui tourne à l’intérieur ou à l’extérieur du stator, que nous appellerons « rotor ». Car elle rote. CQNPNDD (ce qu’il n’était pas nécessaire de démontrer).

Et là, nous avons exactement la tête que nous voulions pour notre moteur.

schéma rotor stator moteur

On voit bien le stator, immobile.

Il est traversé d’un long trou, dans lequel est logé le rotor, supposé tourner.

La moitié du chemin est parcourue. Parce qu’avec cette précision sur le rotor et le stator, nous avons une image extérieure de la morphologie de notre moteur électrique.

C’est très bien.

  • Nous savons donc maintenant que notre moteur doit être composé de deux parties.
  • Nous savons aussi que le rotor doit tourner dans le stator.
  • Enfin, nous savons que ce rotor est entraîné en rotation par une force invisible.

La suite, c’est alors de se souvenir de ce dont un peu plus haut : la force d’attraction magnétique est celle qui remplit cette mission, d’entraîner le rotor en rotation.

Mais comment fait-elle ?

Comment faire tourner le rotor grâce à la force magnétique

Plus haut, nous avons remarqué que si nous fixions un aimant en ne lui laissant que la liberté de tourner, on savait lui imposer une rotation.

Pour ce faire, il suffisait de l’attirer avec un autre aimant, et de faire courir cet aimant de manière circulaire.

Le problème, c’était qu’on doit faire tourner l’aimant à l’extérieur pour entraîner l’aimant à l’intérieur. Après ce constat d’échec, nous avons compris que pour arriver à nos fins, nous avons besoin d’un rotor et d’un stator.

Voyons alors s’il n’est pas possible de mélanger les deux idées.

Idéalement, il nous faudrait parsemer notre stator d’aimants qui s’éteignent et qui s’allument les uns après les autres.

De cette manière, on simulerait la course circulaire d’un aimant. Et on entraînerait le rotor en rotation.

Un peu comme ça :

schéma moteur qui tourne

L’idée est séduisante, car nous avons devant nos yeux un moteur qui tourne.

Mais le problème, c’est que je ne connais aucun aimant permanent capable de s’éteindre, de se rallumer, et de changer de polarité à la demande. Ce n’est pas pour rien qu’on les appelle « aimants permanents ».

Or jusqu’à présent nous n’avons utilisé que des aimants permanents.

Leur principe est infiniment simple : ils font exactement et en toutes conditions ce qu’on attend d’un aimant. Ils aimantent.

Ni plus ni moins.

Comme les aimants du frigo.

Pour le rotor, ça suffit amplement. Mais pour le stator, on aimerait un peu plus. Il faudrait trouver des aimants dont on pourrait contrôler la polarité.

Sans avoir à changer de position, ils inverseraient leurs pôles sud et nord, et ils pourraient s’éteindre.

Bon. Vous me voyez peut-être venir.

Et si vous ne me voyez pas venir, je vais vous donner un indice qui vous permettra de me voir venir : le moteur est branché à l’électricité.

Mais oui, voilà.

Les aimants qui nous intéressent sont les électroaimants.

Les électroaimants, super-aimants capables de changer de polarité

Nous n’allons pas rentrer dans des détails trop complexes, mais les électroaimants sont une idée de génie, qui vient d’une propriété de base de l’électricité.

Cette propriété dit que quand un courant électrique passe dans un fil conducteur, il crée un champ magnétique autour du fil.

champ magnétique fil conducteur

Autrement dit, si on approche de la poussière d’acier autour du fil, les petites particules d’acier seront attirées par les lignes de force du champ magnétique. Elles ressembleront aux milliers d’astéroïdes qui composent les anneaux de Saturne.

C’est très beau, mais un champ magnétique circulaire n’affiche aucun pôle. Alors qu’un aimant comporte forcément deux pôles.

Il nous faut donc un champ magnétique linéaire, doté d’un pôle nord et d’un pôle sud.

Et puisque nous savons qu’un fil droit forme un champ magnétique circulaire, nous pouvons imaginer qu’un fil circulaire créera un champ magnétique linéaire. Et c’est presque le cas.

Car pour former un électroaimant, il faut deux éléments :

  • Un matériau spécial qu’on dit “perméable” au champ magnétique ;
  • Et un fil qui tourne autour de ce matériau, en formant une bobine.
schéma électroaimant

L’électroaimant est la dernière pierre qui manquait à notre édifice :

  • S’il n’y a pas de courant, l’aimant est éteint ;
  • Mais si le courant arrive dans un sens, alors l’aimant présente un pôle nord et un pôle sud ;
  • Et si le courant coule dans l’autre sens, le pôle nord devient le pôle sud pendant que le pôle sud devient le pôle nord.
  • Comme on veut que les électroaimants changent régulièrement de polarité, on aura donc besoin d’un courant alternatif, en opposition au courant continu – car ce courant alterne son sens de passage dans la bobine.

C’est gagné.

Il ne reste plus qu’à intégrer les électroaimants dans notre moteur.

L’assemblage final du moteur électrique

Reprenons notre dernier moteur, et remplaçons les aimants du stator par les électroaimants que nous venons de découvrir.

schéma moteur électrique électroaimants

Il ne reste alors plus qu’à activer les électroaimants en vis-à-vis les uns après les autres pour que le rotor suive le mouvement.

Ainsi, pour faire tourner le rotor, il va falloir :

  • Éteindre les électroaimants horizontaux ;
  • Allumer l’électroaimant en haut à droite pour qu’il présente le pôle nord ;
  • Tandis que celui en bas à gauche s’allume et présente le pôle sud.

Nous constatons donc que pour faire tourner le rotor, il faut que les électroaimants marchent par équipes. Il y en a deux qui s’allument, ceux qui sont en vis-à-vis, tandis que les autres s’éteignent.

Les électroaimants qui s’allument en même temps font partie d’une même équipe, qu’on appelle « phase ». Le moteur que nous avons dessiné fonctionne grâce à trois paires d’électroaimants qui s’allument les uns après les autres, il a donc trois phases.

Et il n’a pas de raisons d’en rougir, car tous les moteurs électriques à l’usage des véhicules électriques ont eux aussi trois phases.

En revanche, le moteur que nous avons dessiné a le droit de rougir sur un autre point : son rotor n’a que deux pôles.

Un seul pôle nord, et un seul pôle sud.

Le problème de cette modeste bipolarité, c’est que la puissance d’un moteur électrique dépend largement du nombre de pôles que contient son rotor.

Ce qui veut dire que notre moteur gagnerait en puissance si nous lui rajoutions des pôles.

Pour la peine, mettons donc quatre pôles à son rotor :

  • deux pôles nord,
  • et deux pôles sud.

Attention : si nous multiplions par deux le nombre de pôles, on multipliera par deux le nombre d’électroaimants pour chaque phase. Ainsi, on passe de deux électroaimants par phase à quatre électroaimants.

Pas besoin de se briser les neurones, nous n’entrerons pas dans les détails.

Mais à titre informatif, nous allons quand même dessiner les bobines comme elles le sont dans la réalité. À la guerre comme à la guerre, nous touchons au but.

schéma moteur bobines distribuées

Et voilà le travail !

Nous voyons bien sur l’illustration précédente que le stator est maintenant constitué de quatre pôles, et que les trois phases du stator s’activent les unes après les autres.

Et nous voyons aussi un moteur parfaitement fonctionnel, à qui il ne manque plus grand-chose.

Mieux, nous avons sous les yeux un moteur qui pourrait parfaitement être celui de notre moto électrique.

Vous pouvez donc pousser un grand « ouf » de soulagement.

Car oui, félicitations, vous assemblé votre premier moteur électrique synchrone à aimants permanents. C’est l’une des 6 technologies de moteurs électriques les plus utilisées dans la mobilité électrique.

Il vous reste donc à découvrir les 5 autres technologies existantes pour avoir fait un tour complet de propriétaire.

Mais ne vous inquiétez pas, c’est ce que nous allons faire dans la prochaine partie.

Et comme vous maîtrisez les bases, nous n’allons plus nous embêter à tout redessiner. Nous allons plutôt nous concentrer sur ce qui importe vraiment : les forces et les faiblesses de chacune des 6 technologies dont je vais vous parler.

Quels sont les différents types de moteurs électriques ?

Des technologies de moteurs électriques, il en existe des tonnes :

  • moteur à courant continu,
  • à courant alternatif,
  • synchrone,
  • asynchrone,
  • brushless,
  • rotor bobiné,
  • réluctance,
  • cage d’écureuil…

Il y a de quoi s’y perdre !

Mais pour y voir plus clair, j’ai dessiné un arbre simplifié des moteurs électriques :

carte des types de moteurs électriques

En sachant que sur cet arbre, j’ai fait le choix de ne pas développer la branche des moteurs électriques à courant continu. Et que je n’ai pas non plus dissocié les moteurs monophasés et triphasés.

Mais avec lui, vous avez une photographie relativement complète des technologies de moteurs existants. Et nous allons évoquer tous les moteurs que vous voyez sur cet arbre.

À commencer par le moteur électrique à courant continu.

Le moteur électrique à courant continu

Le moteur à courant continu contredit tout ce que nous avons vu plus haut.

Car contrairement aux autres moteurs électriques, ce n’est pas sur son stator que sont placés les électroaimants, mais sur son rotor. Et son stator n’est constitué que d’aimants permanents.

schéma moteur à courant continu

Pourquoi une telle particularité ?

À cause de son alimentation en courant continu.

Plus haut, nous avons vu que pour faire tourner un rotor, il fallait éteindre et allumer des électroaimants. Pour ça, une seule solution : utiliser du courant alternatif. Mais manque de chance, c’est un moteur à courant continu.

La solution est alors de procéder à l’inverse :

  • le stator est couvert d’aimants permanents,
  • et le rotor est couvert d’électroaimants.

La suite, c’est d’installer des balais sur l’arbre du rotor, dont l’objectif sera justement d’inverser le sens du courant de manière régulière.

Comment le font-ils ?

Très simple : ces balais (en gris sur l’image suivante) alimentent le rotor par contact direct avec des demi-bagues (en rouge et en bleu).

L’intérêt de ces demi-bagues, c’est qu’il suffit alors d’inverser les branchements des bobines pour qu’avec un même courant, l’électricité traverse les bobines dans deux sens différents.

schéma balais moteur

Ainsi, on transformera un courant continu en courant alternatif qui alimentera les bobines du rotor. Car à chaque demi-rotation, le courant s’inversera. Et ce faisant, les électroaimants du rotor inverseront leur polarité régulièrement afin d’être toujours attirés par les aimants permanents du stator.

Les avantages du moteur à courant continu sont nombreux :

Mais ils présentent un désavantage impardonnable : toute la puissance électrique du moteur passe par les balais. Ce défaut limite donc leur puissance et leur durée de vie, car pour augmenter la puissance on doit augmenter le nombre de balais, qui finissent par s’user et nécessiter un remplacement.

On trouvera donc difficilement des moteurs à courant continu de plus de 15 kW de puissance nominale.

Et leur rendement ne sera jamais aussi bon que celui des moteurs à courant alternatif que nous allons voir plus loin.

Mais sur des véhicules électriques dont la puissance n’excède pas 15 kW (les vélos, les trottinettes, les motos équivalentes 50 et 125), ils sont pertinents. D’autant qu’ils ne sont pas si lourds : ce moteur affiche par exemple une puissance nominale de 13 kW pour 11 kg.

Quand on calcule sa puissance spécifique à partir de sa puissance en crête (25 kW), on obtient alors un joli score de plus de 2 kW/kg.

C’est très beau !

Si vous ne craignez pas les aimants permanents, je crois donc que le moteur à courant continu peut faire son petit effet. Pourtant, ce sont bien les moteurs électriques à courant alternatif qui règnent sur le marché de la mobilité électrique.

Et nous allons voir les raisons de cette prévalence dans les prochains paragraphes.

Le moteur électrique à courant alternatif

Comme son nom l’indique, le moteur à courant alternatif est un moteur électrique alimenté par un courant alternatif. Il s’oppose donc au moteur à courant continu en ce point, qui lui permet de se passer de balais dans la majorité des cas.

Mais avant de comprendre le monopole des moteurs à courant alternatif comme promis, il est bon de jeter à nouveau un œil sur l’arbre des moteurs électriques :

arbre des moteurs électriques synchrones et asynchrones

Maintenant que la branche des moteurs continus est validée, nous voyons sur cet arbre que la branche des moteurs à courant alternatif se divise elle-même en deux sous-branches :

  • les moteurs asynchrones,
  • et les moteurs synchrones.

Haut les cœurs, voyons donc ce que ces termes cachent dans leurs entrailles.

Le moteur asynchrone

Moteur asynchrone © jean charles barbe

Le moteur asynchrone, aussi appelé « moteur à induction », est un moteur électrique extrêmement prometteur.

D’abord, parce qu’il ne nécessite aucun aimant permanent. Ce qui, comme nous allons le voir un peu plus loin, est un atout non négligeable à la fois pour l’environnement et pour la souveraineté industrielle de notre continent.

Ensuite, parce que son fonctionnement est sublime.

Si sublime qu’il contredit tout ce que nous avons vu plus haut sur le fonctionnement des moteurs électriques. Car ce qui le met en rotation n’est en aucun cas une attraction magnétique entre des aimants.

Et pour cause, le mécanisme qui le met en rotation est contenu dans son nom : l’induction.

En quelques lignes, voilà en quoi consiste ce mécanisme d’induction.

D’abord, il faut savoir que le stator du moteur asynchrone est le même que le stator que nous avons dessiné plus haut. Il est donc recouvert de bobines qui servent d’électroaimants. Ce stator est alimenté en courant alternatif, ce qui lui permet de générer un champ magnétique tournant.

En son sein, on place alors un rotor avec une forme spéciale :

  • Soit en forme de cage avec des barres positionnées longitudinalement – ce qui lui vaut le nom de rotor en « cage d’écureuil » ;
  • Soit avec des bobines branchées en boucles fermées – ce qui lui vaut le nom de rotor bobiné.

Et c’est à ce moment que la magie opère : positionné dans le champ magnétique tournant du stator, ce rotor génère lui-même un champ magnétique, qu’on appelle « champ magnétique induit ».

D’où le mécanisme d’induction.

Or ce champ magnétique induit qui est constitué de pôles nord et de pôles sud voudra s’aligner avec le champ magnétique tournant du stator.

Il se mettra donc à tourner :

schéma moteur induction

Vous voyez donc ici le fonctionnement d’un moteur asynchrone, aussi appelé moteur à induction.

Vous noterez que sur cette illustration, le rotor tourne à la même vitesse que le champ magnétique tournant du stator. C’est une erreur que j’ai commise car mes compétences graphiques sont trop limitées.

Mais il est important de le noter : le rotor d’un moteur asynchrone tourne toujours moins vite que le champ magnétique du stator.

C’est d’ailleurs pour cette raison qu’on décrit ce moteur avec le terme « asynchrone », puisque son rotor et le champ magnétique de son stator ne sont pas synchronisés.

Et pour cause : s’ils l’étaient, le rotor se démagnétiserait, puisqu’il ne produit un champ magnétique que s’il perçoit le champ magnétique du stator comme changeant. Or s’il tourne à la même vitesse, le champ magnétique du stator lui semblera fixe.

C’est sans doute en ça que le fonctionnement du moteur asynchrone est passionnant.

Mais non content d’avoir une telle élégance dans son mécanisme, le moteur asynchrone est très performant :

  • Il ne contient aucune terre rare ;
  • Il est relativement simple à construire et à piloter ;
  • Aussi, il peut fournir une puissance spécifique dépassant les 6 kW/kg, ce qui est très beau ;
  • Et c’est le moteur qui gaspille le moins d’électricité lorsqu’on le sollicite faiblement.

Sa seule faiblesse, c’est qu’il consomme plus d’électricité que les autres moteurs électriques lorsqu’on lui demande de fortes quantités de couple. Disons que c’est un rappel que chaque qualité est souvent livrée avec un compromis.

Si ce moteur vous intéresse, j’y ai décrit tout mon amour dans cet article :

Vous y trouverez tout ce qu’il y a à savoir sur le moteur asynchrone. Et je vous préviens de suite, votre niveau d’exigence envers les constructeurs automobile risque de monter d’un cran.

Les moteurs synchrones

Après avoir étudié un peu plus en détail le moteur asynchrone, il est temps de passer au moteur synchrone. Ou plus précisément, aux moteurs synchrones (au pluriel), car il existe 4 technologies de moteurs électriques synchrones qui se disputent une place au soleil :

arbre des moteurs électriques synchrones

Ces 4 technologies de moteurs électriques synchrones sont les suivantes :

  • Le moteur brushless ;
  • Le moteur synchrone à rotor bobiné ;
  • Ainsi que le moteur à réluctance variable ;
  • Et le moteur à réluctance à aimants permanents.

Sans perdre de temps, voyons donc ce que chacun de ces 4 moteurs électriques synchrones a d’intéressant pour la mobilité électrique. À commencer par celui que nous connaissons le mieux, le moteur brushless.

Le moteur brushless

moteur brushless © jean charles barbe

Pourquoi le décrire comme celui que nous connaissons le mieux ?

Simplement car c’est le moteur électrique que nous avons dessiné tout au long de la première partie de cet article, où nous avons découvert le fonctionnement des moteurs électriques.

Je ne vais donc pas me perdre en explications sur le fonctionnement des moteurs brushless, puisque c’est lui que nous avons vu précédemment.

Mais pour rappel, voici une illustration de son fonctionnement, avec son rotor couvert d’aimants permanents :

schéma fonctionnement moteur brushless

Plutôt que de me perdre en détails sur son fonctionnement, je vais donc tenter de comprendre pourquoi c’est ce moteur qu’on retrouve dans toutes les motos électriques disponibles sur le marché, ainsi que dans tous les scooters électriques que je connais.

Cette prédominance est assez curieuse, car le moteur brushless est l’un des moteurs électriques qui fournit la plus faible puissance spécifique : à peine plus de 1 kW/kg en moyenne, soit 9 fois moins que ce qu’offre le moteur de la Model 3 de Tesla, que nous allons évoquer plus loin.

Note : Certains moteurs brushless à flux axial ont de bien meilleures performances, donc il existe évidemment quelques exceptions à cette règle. Ces informations sont donc à prendre avec une capacité de nuance que tous les passionnés de technique doivent garder avec eux.

Sans compter qu’il est garni d’aimants permanents, ce qui lui impose d’être approvisionné en terres rares.

Et quand on sait que ces terres rares sont l’un des plus grands dangers en termes d’approvisionnements pour tous les constructeurs de véhicules électriques, on doute de la pertinence de ce choix.

Mais ce doute s’arrête quand on tente soi-même de fabriquer une moto électrique.

Car à ce moment-là, on comprend pourquoi les moteurs brushless ont écrasé la concurrence sur ce segment :

  • Ce sont les moteurs les moins chers du marché ;
  • Ce sont aussi les plus disponibles sur étagères ;
  • Et enfin, on les retrouve dans d’innombrables puissances (tant qu’elles sont modestes), ce qui facilite largement la vie des constructeurs de deux-roues électriques.

Autrement dit, quand on construit un deux-roues électrique et qu’on ne vend pas assez de volume pour avoir les moyens d’investir dans notre propre technologie de moteur électrique, on se tourne vers le moteur brushless.

Vous pouvez retrouver ici un article que j’ai consacré à ce moteur électrique, qui a conquis tout le marché de la moto électrique. Vous y trouverez plus de détails sur son fonctionnement, et vous verrez pourquoi je considère que le monopole de ce moteur n’est pas le meilleur calcul.

Et pour cause : quand on souhaite passer à l’échelle, on se rend compte qu’on aurait mieux intuité de prendre un moteur dont on maîtrise la conception. Et on réalise à ce moment-là qu’on est maintenant pieds et poings liés par notre fournisseur chinois.

C’est pour cette raison que je crois un peu plus au moteur synchrone à rotor bobiné, entièrement maîtrisé par Renault, l’un de nos fleurons nationaux.

Le moteur synchrone à rotor bobiné

Moteur Renault Zoe

Le moteur synchrone à rotor bobiné reprend le même principe de fonctionnement que le moteur brushless, mais avec un rotor bobiné.

Ce qui veut dire que les aimants permanents du rotor sont remplacés par des électroaimants :

schéma moteur rotor bobiné

Cette particularité lui vaut de n’être composé d’aucun aimant permanent, avec toutes les conséquences positives sur l’approvisionnement et l’impact environnemental dont nous allons discuter à la fin de cet article.

Pour autant, cette absence d’aimants permanents présente un prix.

Car pour faire fonctionner les électroaimants du rotor, on doit installer des balais qui permettent de l’alimenter en électricité. Or ces balais fonctionnent par contact direct sur le rotor, ce qui leur vaut de générer des frottements mécaniques, qui diminuent le rendement global de ce moteur électrique.

Et ces mêmes balais empêchent de fournir une puissance spécifique gargantuesque, puisqu’ils limitent la puissance électrique qu’on peut fournir au rotor. Ce moteur n’affiche donc une puissance spécifique « que » de 2 kW/kg.

Voilà donc pour les faiblesses de ce moteur électrique.

Mais elles sont à relativiser.

D’abord car 2 kW/kg, ça reste quand même un beau score. Pour s’en convaincre, il suffit de constater qu’avec une telle puissance spécifique, un moteur de 100 kW ne pèse que 50 kg, ce qui est presque négligeable sur une voiture électrique de plus d’une tonne.

Et au rang de ses avantages, il y en a un autre, parfaitement contre-intuitif : le moteur synchrone à rotor bobiné est le moteur qui affiche le meilleur rendement des moteurs électriques à hautes vitesses.

Ça s’explique par un effet secondaire des aimants permanents à haute vitesse, qui génèrent une force perturbatrice appelée « contre-électromotrice ». Le moteur synchrone à rotor bobiné étant débarrassé d’aimants permanents, il ne connaît pas ce problème.

J’ai consacré un article au sujet du moteur synchrone à rotor bobiné de la Renault Zoé. J’y raconte mon admiration pour la pertinence du choix que Renault a fait au moment de la conception de la Zoé.

Vous pouvez le retrouver ici :

Puisqu’on parle des moteurs électriques sans aimants permanents, en voilà un autre qui me séduit aussi beaucoup : le moteur à réluctance variable.

Le moteur synchrone à réluctance variable

Le moteur à réluctance variable est un contrepied à ce que j’ai raconté sur le fonctionnement des moteurs électriques précédemment. Car c’est le seul moteur électrique de cet article qui n’est pas mis en rotation par l’attraction magnétique.

À la place de l’attraction magnétique, c’est un couple de réluctance qu’on retrouve sur ce moteur électrique.

C’est donc ce couple de réluctance qui lui a donné son nom de “réluctance variable”.

Ici, je ne vais pas entrer dans trop de détails sur son fonctionnement. Mais nous allons quand même toucher deux mots du principe principal qui guide son fonctionnement.

Ce principe consiste à observer qu’un champ magnétique se déforme lorsqu’il rencontre un obstacle magnétique. C’est-à-dire que lorsqu’on place un matériau moins perméable magnétiquement (qui conduit moins), il se contorsionne légèrement.

Et comme quiconque, il n’aime pas du tout se contorsionner.

Alors il fait son possible pour déplacer l’objet qui le gêne, afin de trouver les endroits les plus favorables au passage de son champ magnétique. Il génère donc un couple de réluctance (ou une force de réluctance), afin de le faire bouger.

Dans un moteur à réluctance variable, on utilise justement ce couple de réluctance.

Pour ce faire, il suffit de positionner des trous dans son rotor. Car les trous remplis d’air conduisent moins bien le champ magnétique que le métal du rotor.

Le champ magnétique du stator fait donc tourner le rotor pour éviter ses trous.

Il suffit alors de faire tourner le champ magnétique du stator (comme dans les autres moteurs électriques à courant alternatif) pour que le rotor se mette à tourner continuellement, à cause du couple de réluctance :

schéma moteur réluctance variable

Autrement dit, le moteur à réluctance variable est un moteur aussi sublime que le moteur à induction dans son fonctionnement.

Et il ne se contente pas d’être très élégant, car il présente aussi de très belles qualités :

  • sa puissance spécifique est supérieure à 3 kW/kg,
  • son rendement est très bon sur une large gamme de régimes,
  • et il ne nécessite aucun aimant permanent.

Ce qui me fait penser que c’est certainement un moteur électrique très prometteur.

Mais pour le moment, force est de constater qu’il n’a pas encore trouvé son marché, car on ne le retrouve chez aucun véhicule électrique à ma connaissance. Certainement car c’est encore une technologie qui n’a pas encore été assez explorée par les constructeurs automobiles.

En revanche, s’il y a bien une technologie de moteur électrique qui a été exploitée, c’est la plus proche cousine du moteur à réluctance variable.

J’ai nommé le moteur réluctance à aimants permanents.

Le moteur synchrone à réluctance à aimants permanents

illustration moteur tesla

Ce moteur électrique reprend exactement le même principe de fonctionnement que le moteur à réluctance variable, mais il l’enrichit pour le rendre quasiment imbattable. Et cet enrichissement vient des aimants permanents qu’on lui a ajoutés, comme vous l’aurez deviné grâce à son nom.

En effet, le moteur synchrone à réluctance tire profit d’une idée lumineuse.

Cette idée, c’est d’ajouter l’attraction magnétique au couple de réluctance, afin d’augmenter la capacité de puissance des moteurs à réluctance.

Et comme si c’était fait exprès, il suffit pour ça de mettre des aimants permanents dans les trous du rotor pour qu’on puisse conserver le mécanisme de couple de réluctance, en ajoutant l’attraction magnétique.

Sublime, non ?

schéma moteur réluctance aimants permanents

Si bien qu’à la fin, le moteur à réluctance à aimants permanents devient imbattable en termes de performances. Il réussit à atteindre des puissances spécifiques supérieures à 9 kW/kg chez Tesla, et des rendements très élevés sur toute sa gamme de vitesses.

Ce qui lui vaut, sans surprise, de convaincre de nombreux constructeurs de voitures électriques.

Car ceux-là considèrent que leurs voitures électriques doivent être équipées avec les moteurs électriques les plus performants du marché. On trouve donc ce moteur électrique sur toutes les voitures électriques de Tesla, Jaguar, Nissan, Toyota et BMW.

Rien que ça.

J’ai d’ailleurs étudié le moteur à réluctance à aimants permanents qui équipe les voitures de Tesla. Si vous voulez une démonstration implacable que le constructeur californien a recruté les meilleurs ingénieurs du monde, cet article risque de vous intéresser :

Mais vous l’aurez constaté, ce moteur électrique est constitué d’aimants permanents.

Et jusqu’à présent, j’ai répété à l’envi que c’était un défaut, mais je n’ai pas pu m’épancher sur les raisons qui me font dire ça.

C’est donc le moment d’en discuter, et d’étudier plus largement l’impact environnemental des moteurs électriques. Car les véhicules électriques sont censés afficher une exemplarité écologique salutaire pour notre futur.

Il paraît donc nécessaire de vérifier que les moteurs électriques qui les constituent ne sont pas leur talon d’Achille.

Quel est l’impact environnemental d’un moteur électrique ?

Lorsqu’on veut se faire une idée sur l’impact environnemental d’un objet, on doit l’étudier aussi rigoureusement que possible. Et rigoureusement, ça veut dire qu’on ne doit laisser aucun angle mort dans notre étude.

C’est-à-dire qu’on doit penser à analyser le triptyque suivant :

  • L’impact de sa fabrication ;
  • Celui de son usage ;
  • Et celui de sa fin de vie.

C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il est aberrant de considérer les véhicules électriques comme des véhicules « zéro émissions ». Car s’ils n’émettent rien lorsqu’ils roulent, ils ont un impact sur les trois axes du triptyque précédent.

La question est alors la suivante : est-ce que le moteur électrique contient la plus grande partie de l’impact environnemental des véhicules électriques ?

La réponse immédiate, c’est de hurler que non, les moteurs électriques n’ont pas un impact environnemental conséquent.

Mais la réponse intelligente, c’est de reconnaître que d’une certaine manière, leur impact reste non négligeable.

Les moteurs électriques ont un impact écologique faible

Pourquoi une telle ambigüité dans ma réponse ?

Simplement car quand on compare les émissions de gaz à effet de serre de la production d’un moteur électrique avec celle de la production d’une batterie électrique, le déséquilibre est notable :

  • La production d’un moteur électrique de 10 kW émet environ 420 kgCO2eq[1];
  • Quand celle d’une batterie de 10 kWh (généralement, on trouve environ autant de kWh que de kW) est coupable d’émissions s’élevant à 750 kgCO2eq[2].

Face à ce chiffre, on ne peut que constater qu’il est plus urgent de baisser les émissions de gaz à effet de serre de la production des batteries. Et on peut appuyer sur ce beau score en ajoutant qu’à l’inverse des batteries, les moteurs électriques ont une fin de vie très peu émettrice.

Mais ce raisonnement ne peut pas tenir.

D’abord car l’impact climatique (puisqu’ici, on n’a parlé que d’émissions de gaz à effet de serre) des moteurs électriques n’est pas si faible. Il est presque moitié moins élevé que celui des batteries, mais on ne peut pas se satisfaire d’une division par 2. On doit viser le chiffre le plus faible possible.

Ensuite car nous n’avons parlé ici que d’émissions de gaz à effet de serre.

Et quand on parle d’impact environnemental, on ne peut pas étudier que le climat.

On doit aussi regarder ce qu’il en est de l’impact sur le vivant, sur les sols, les eaux, et même sur les populations. Et à ce jeu, les moteurs électriques peuvent progresser.

Les matériaux du moteur électrique sont les coupables

Aujourd’hui, l’écrasante majorité des moteurs électriques sont équipés des mêmes composants. Des matériaux que vous connaissez bien, si vous êtes familiers avec la mécanique d’une moto :

  • de l’acier électrique,
  • de l’aluminium,
  • du cuivre,
  • des matériaux non conducteurs,
  • et des aimants permanents.

Seuls quelques moteurs dérogent à cette règle, en n’étant pas constitués d’aimants permanents.

Nous les avons évoqués, ces moteurs sont le moteur à réluctance variable, le moteur synchrone à rotor bobiné et le moteur à induction. Et comme vous l’aurez sans doute noté, j’ai tenu pour chacun à préciser que cette absence d’aimants permanents était un détail très favorable.

Pourquoi ?

Car les aimants permanents sont faits de néodyme, un métal qui appartient à la famille des terres rares. Or la production de ce néodyme, comme celle de toutes les terres rares, est devenue extrêmement problématique ces dernières années.

Le problème principal de la présence de néodyme dans les moteurs électriques, c’est que la Chine a développé une domination très impressionnante sur sa production : 67% du néodyme produit en 2020 vient de Chine[3].

On peut parfaitement imaginer s’approvisionner en minerais dans un pays producteur extérieur au nôtre.

Mais le problème se situe dans la quasi-absence d’alternatives au néodyme chinois. Et dans un monde où nos ressources vont commencer à tarir, un quasi-monopole n’est jamais un bon signe.

Surtout quand on sait que quand on subit un monopole, on n’a aucun moyen de négocier.

Si on découvre alors (comme c’est le cas) que les conditions d’extraction des terres rares en Chine sont un désastre écologique et humain, on est piégé. Car on ne peut pas menacer la Chine de s’approvisionner ailleurs, puisque les alternatives compétitives sont rares.

Autrement dit, utiliser du néodyme revient aujourd’hui à subir la domination d’une giga puissance étrangère sur notre approvisionnement. Mais aussi à assister de manière impuissante à leur exigence écologique beaucoup plus faible que la nôtre.

J’ai écrit un article plus complet au sujet du problème des terres rares, où j’entre plus en détails sur les véritables impacts des terres rares.

Vous pouvez le retrouver ici :

Ce qu’il faut en retenir est simple.

C’est que dans la mesure du possible, et pour les 10 prochaines années, nous ferions mieux d’éviter les terres rares.

Mais ce n’est pas si simple.

Car en même temps que les aimants permanents en néodyme sont un risque pour les moteurs électriques, leur présence amène aussi un avantage écologique non-négligeable : ils permettent de gaspiller moins d’électricité.

Optimiser le rendement pour diminuer l’impact de l’électricité perdue ?

En effet, les moteurs électriques avec le meilleur rendement sont les moteurs électriques dotés d’aimants permanents. Ils permettent de gagner quelques points de pourcents de rendement, ce qui leur vaut de consommer moins d’électricité.

Or la consommation d’électricité est justement le poste d’émissions de gaz à effet de serre le plus important des moteurs électriques, puisque l’électricité représente 98% de leurs émissions sur leur durée de vie[1].

Si bien qu’à la fin, les aimants permanents permettraient de gagner quelques tonnes d’émissions de CO2eq sur la durée de vie des véhicules électriques (l’étude qui a obtenu ces résultats s’est basée sur l’électricité espagnole).

Quel casse-tête !

Car les terres rares sont l’exacte illustration d’un dilemme éthique, dont la réponse n’est en aucun cas évidente :

  • Si on choisit de s’en passer, on consomme plus d’électricité, et donc on rejette plus d’émissions de gaz à effet de serre ;
  • Si on choisit d’en utiliser, on accepte de se soumettre à une superpuissance chinoise aux intentions ambiguës.

C’est quasiment impossible de se décider.

Quoi que… Il y a peut-être une solution.

Si on arrivait à produire de l’électricité peu carbonée (comme c’est déjà le cas en France), alors on minimiserait l’impact climatique des pertes en rendement. On pourrait alors se permettre de se passer de terres rares, ce qui nous offrirait de réduire l’impact environnemental global des moteurs électriques.

Ça serait élégant, non ?

Voilà pourquoi je crois tant dans les moteurs électriques sans aimants permanents.

Car il suffit d’appuyer sur un phénomène qui est déjà en cours (la transition énergétique) pour que leurs défauts soient minimisés, et leurs qualités maximisées.

C’est pour cette raison qu’il faut d’ores et déjà favoriser les moteurs sans aimants permanents. On ne le regrettera pas, lorsque le moteur sera venu où la Chine décidera de serrer la vis sur leurs exportations de néodyme.

Il n’y a plus qu’à !

Notre moto électrique sera donc équipée d’un moteur sans aimants

Je vous ai raconté dans cet article tout ce que je savais sur les moteurs électriques, et tout le cheminement par lequel je suis passé pour en arriver à cette conclusion : notre moto électrique sera la première moto électrique dont le moteur n’aura pas d’aimants permanents.

C’est un pari osé, puisque personne ne l’a fait jusqu’à présent.

Mais nous sommes en train de le réussir.

Car notre premier prototype utilise un moteur à induction.

Si vous avez envie de participer à cette aventure en rupture avec le reste du marché, et que vous croyez vous aussi que le futur se trouve dans les moteurs électriques sans aimants permanents, alors j’ai ce qu’il vous faut.

Je rédige en effet un journal de bord dans lequel je raconte tout ce que j’ai découvert dans la conception de notre moto électrique. Je vous y raconte tout. Tout ce qui concerne l’autonomie, l’écologie et le design de notre future moto électrique.

Pour le recevoir, il vous suffit de vous inscrire grâce au formulaire ci-dessous :

Note : après 3 ans de travail & une conception aboutie de mon premier prototype de moto électrique, j’ai décidé de stopper mon journal de bord. Vous pouvez néanmoins retrouver les archives de ce journal de bord en cliquant ici.

On se retrouve de l’autre côté !

Questions fréquentes sur les moteurs électriques

Quelles sont mes sources ?

[1] A. Rassõlkin et al., « Life cycle analysis of electrical motor-drive system based on electrical machine type », Proc. Est. Acad. Sci., vol. 69, no 2, p. 162‑177, janv. 2020.

[2] M. Mohr, J. F. Peters, M. Baumann, et M. Weil, « Toward a cell-chemistry specific life cycle assessment of lithium-ion battery recycling processes », J. Ind. Ecol., vol. 24, no 6, p. 1310‑1322, 2020.

[3] P. Dias, S. Bobba, S. Carrara, et B. Plazzotta, THE ROLE OF RARE EARTH ELEMENTS IN WIND ENERGY AND ELECTRIC MOBILITY An analysis of future supply/demand balances. 2021.

Comment alimenter un moteur électrique ?

Sur un véhicule électrique, le moteur électrique est alimenté par une batterie électrique.

Mais attention : il existe différents types de batteries. J’ai écrit un article qui résume toutes les technologies accessibles sur le marché, que vous pouvez consulter en cliquant ici. Si le sujet vous passionne, vous devriez y trouver votre bonheur.

Où acheter un moteur électrique ?

Si vous cherchez un moteur électrique neuf, je vous conseille de jeter un œil aux sites Ozo Electric et EV-Shop. J’y ai acheté plusieurs composants. Vous pouvez également faire confiance au site kit-elec-shop, qui a un bon service client.

Si vous préférez un moteur électrique d’occasion (ce que je vous encourage à faire), je trouve généralement mon bonheur sur Le Bon Coin. Parfois, inutile d’aller chercher bien loin.

Mon adresse e-mail est publique, et vous pouvez m’écrire à tout moment. La voici : julien@construire-sa-moto-electrique.org. Vous pouvez également me contacter sur LinkedIn.

16 commentaires

  1. Lionel

    Pas de problème ! A un autre endroit lorsque vous écrivez « Nous voyons bien sur l’illustration précédente que le rotor est maintenant constitué de quatre pôles, et que les trois phases du rotor s’activent les unes après les autres », c’est plutôt les 3 phases du stator non ? Merci !

  2. Lionel

    Bonjour, merci pour l’article génial ! Par contre, il est écrit « Idéalement, il nous faudrait parsemer notre rotor d’aimants qui s’éteignent et qui s’allument les uns après les autres. ». Ce n’est pas plutôt le stator ??

  3. Bernard S

    Bonjour Julien,
    Je suis admiratif par votre engagement et vous remercie de partager vos connaissances.
    Vous expliquez de manière simple et concise cette technologie complexe .
    Je collabore depuis plusieurs décennies dans la réparation automobile et je constate
    avec plaisir une orientation bénéfique pour tous pour la mobilité publique de demain,.
    Certainement qu’il y a encore beaucoup de chemin à parcourir pour arriver à une mobilité vertueuse
    en tous points mais il faut laisser le temps au temps .

  4. paul

    Bonjour Julien,
    J’étais à peu près certain que ce gars te plairait.
    Sinon, que penses-tu des machines tournantes à flux axial et de la solution logicielle deeper pulse ?

  5. paul collomb

    Bonjour Julien,

    je viens de prendre connaissance de ton email « Ça faisait longtemps » …
    C’est toujours un réel plaisir de te lire.

    Je me permets de te transmettre quelques liens sur la conception des moteurs électriques (que tu connais peut être déjà) :
    – un concepteur qui travaille dans le même esprit que toi
    https://www.masinaelectrica.com/
    – Un « champion » français qui devrait équiper les VE Renault
    https://whylot.com/
    (les machines tournantes à flux axial … +++ !)
    – et enfin, des pointures d’une grande école d’ingénieurs Française qui ont dévellopé un logiciel de conception remarquable, en avance sur tout le monde y compris à l’international
    https://deeperpulse.com/

    Si ça peut aider pour affiner tes choix dans la conception du moteur de ta moto.

    Cordialement.

  6. Hisseine

    Salut Julien.
    Bien que je suis profane dans ce domaine, votre article est très intéressant pour moi.
    je suis comptable de formation, mais aussi un agriculture dans l’âme.
    j’ai rencontrer beaucoup de difficultés dans le cadre de mes travaux champêtre ( si on trouve l’occasion je t’expliquerai avec plus de détails). Partant de là j’ai eu l’idée de créer une start-up de motos électrique. J’ai d’abord contacter un fabricant de moto électrique pour acheter une moto électrique afin de faire une étude de marché mais le fabricant est un peu réticent et la moto coût chère 2000$ prix usine. Alors je fais des recherches en ligne sur les motos électrique et je suis tomber sur vous. Alors si vous pouvez m’aider ou m’orienter dans mon projet je serai vraiment reconnaissant envers vous. Merci d’avance.

  7. Laurent CHENU

    Bonjour,

    Intéressant comme projet et comme approche. Je suis curieux et souhaiterais avoir plus d’info.
    Je travail pour Damon Motorcycles (conception inverteur et BMS).

    Merci d’avance

  8. Thomas Nepveux

    Bonsoir,

    J’ai lu avec beaucoup d’intérêt cet article, et je trouve votre démarche admirable, courageuse, solidaire et inclusive, ce qui ne gâte rien. En plus, votre objectif coïncide avec un de mes rêves les plus anciens : fabriquer son propre véhicule !
    J’ai 50 ans, et j’ai grandi avec une énorme passion pour les engins à moteur. Puis, graduellement, je suis arrivé à la réalisation que notre monde ne pouvait pas continuer ainsi. Pour ma part, cela m’a mené à la propulsion humaine, de type vélomobile, avec une assistance électrique légère à tous point de vue : poids (moins de 3kg batterie comprise) et puissance (500W en continu). Je travaille depuis quelques temps déjà à la conception d’un prototype, mais plus j’apprends, plus je me rends compte de tout ce que j’ignore, d’autant plus que je suis exigeant : pas de fibre de carbone ni fibre de verre, structure « skin on frame » bois et toile, avec éventuellement des renforts composites en lin ou basalte, avec l’ambition de faire aussi rigide et au mois aussi léger que la fibre de carbone. Dingue, non ?

    Il me semble toutefois que votre foi en « l’électricité peu carbonée » que nous produirions en France est bien mal placée, comme le contexte actuel paraît le montrer, d’ailleurs. Le savoir-faire nucléaire dont certains se gargarisent à l’envi est moribond, vendu avec d’autres « joyaux de la couronne » ou tué dans l’œuf par l’arrêt des crédits pour la recherche. Centrales obsolètes et EPR interminable ne laissent rien présager de bon pour le nucléaire français et ses utilisateurs.

    Bien des gens vont se rendre de plus en plus compte que la meilleure énergie, c’est celle qu’on n’utilise pas

    Bon courage pour votre projet, je vous souhaite toute la réussite possible

    Thomas Nepveux

    • Julien Vaïssette

      Bonjour Thomas,
      Je m’accorde avec ta conclusion et ton mode opératoire : il faut que les solutions de mobilité décuplent leur rendement énergétique.
      Les solutions actives sont évidemment une solution à ça car en effet, on fera difficilement plus efficace que les cuisses humaines.
      Mais il faut bien tâcher de trouver des solutions diverses afin de répondre à ceux dont l’usage ne peut pas être satisfait par une mode de transport actif.
      Alors je fais ma part, et j’espère que ceux qui s’occupent de la production électrique font eux aussi leur part. Pas d’autre choix, on ne peut que mettre notre espoir dans la compétence des autres !

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