Julien Vaïssette
Fanatique d'Excel, adepte de Camus & ingénieur en mécanique — Posez-moi toutes vos questions à l'adresse julien@construire-sa-moto-electrique.org, ou sur LinkedIn.
La Scramper du fabricant Ukrainien EMGo pourrait devenir un symbole du génie Ukrainien en ces temps difficiles. Car vraiment, c’est une très bonne moto électrique.
Tout au long de votre lecture, gardez en tête que mon adresse e-mail est publique, et que vous pouvez m’écrire à tout moment. La voici : julien@construire-sa-moto-electrique.org. Vous pouvez aussi me contacter directement sur LinkedIn.
La EMGo Scramper est une moto qui attire l’œil. Avec les courbes de son réservoir très agressives, sa silhouette trapue et son inspiration scrambler, elle coche toutes les cases de la tendance actuelle.
Mais ce qui est très impressionnant chez cette moto, c’est qu’elle n’est pas qu’un physique.
Elle renferme en effet dans ses entrailles une mécanique très pertinente. En témoigne sa boite de vitesses, qu’on ne retrouve dans le segment des équivalentes 125 (car oui, c’est une équivalente 125) que chez la Scramper et la CR6 Pro et qui lui permet de garantir une très belle autonomie.
La EMGo Scramper est donc une vraie moto, conçue avec des idées fortes et un panache qui force le respect.
Si on ajoute qu’elle est beaucoup moins chère que ses équivalentes sur le marché, on comprend qu’on tient peut-être ici une concurrente très sérieuse aux motos de Super Soco et Zero Motorcycles.
Mon adresse e-mail est publique, et vous pouvez m’écrire à tout moment. La voici : julien@construire-sa-moto-electrique.org. Vous pouvez également me contacter sur LinkedIn.
D’abord, j’aimerais commencer par un éclaircissement.
C’est que certains articles qui parlent de la EMGo Scramper la décrivent comme une « moto sans permis ». Plus précisément, ils considèrent que c’est une équivalente 50, puisque c’est la seule catégorie de moto qui ne nécessite pas de permis moto (outre la formation AM, qui est déjà un permis en réalité).
S’ils la décrivent ainsi, c’est qu’elle est annoncée avec un moteur dont la puissance nominale est de 3 kW. Or comme ils connaissent bien leurs bases, ils savent que les motos électriques équivalentes 50 rassemblent toutes les motos dont la puissance est strictement inférieure à 5 kW.
3 kW étant strictement inférieur à 5 kW, ils en ont donc conclu que la EMGo Scramper était une équivalente 50.
Hélas, il n’en est rien.
Ou plutôt : heureusement, il n’en est rien.
Car si la Scramper est une équivalente 50, comment expliquer qu’elle soit capable de fournir des performances déjà très belles pour une équivalente 125 ?
Pour s’en convaincre, il suffit de constater qu’elle monte à 122 km/h.
122 km/h, c’est déjà 22 km/h de plus que ce dont est capable la TC Max, qui est une équivalente 125. Il y a donc de fortes raisons de douter que la EMGo Scramper est une équivalente 50.
Et si on veut une réponse définitive à cette question de la catégorie à laquelle appartient la Scramper, il suffit en réalité de regarder une autre donnée : son moteur fournir 15,8 kW de puissance en pic.
C’est-à-dire qu’il est capable, sans surchauffer, de fournir 15,8 kW (ce qui est déjà supérieur aux 11 kW maximums autorisés par le permis 125).
Il n’y a donc aucun doute à avoir sur le sujet : la EMGo Scramper est une équivalente 125.
Cela étant clarifié, il nous reste à résoudre la question qui suit cette réponse : si on s’accorde pour la considérer comme une équivalente 125, est-elle une bonne équivalente 125 ?
Réponse : oui.
Très bonne.
Car vraiment, toutes ses caractéristiques sont remarquables.
D’abord, nous en avons parlé, elle affiche une superbe vitesse de point pour une moto électrique équivalente 125. Hormis la Zero S et la Alrendo TS Bravo, quasiment aucune moto électrique de cette catégorie n’arrive à une telle vitesse.
Ensuite, l’autonomie.
Avec sa batterie de 8,8 kWh, son autonomie est annoncée à 158 km/h pour une vitesse constante de 65 km/h et à 135 km pour une vitesse constante de 95 km/h. L’autonomie réelle en mode de conduite combiné doit donc se situer entre 135 km et 158 km.
Ce qui est à nouveau dans le haut du panier des équivalentes 125.
Enfin, le temps de recharge de 2h pour remplir la batterie de 0% à 100%, et 1h30 pour la remplir de 0% à 80%. Aucune équivalente 125 ne fait mieux, c’est aussi simple que ça.
La EMGo Scramper est donc une très bonne équivalente 125.
Voire peut-être la meilleure.
Si elle arrive à un tel résultat, c’est probablement grâce à l’utilisation d’une boite de vitesses à 4 rapports qui lui permet d’optimiser à la fois la consommation et la gestion du couple dans la roue.
Le seul doute qu’on peut avoir est sur son poids, qui est inconnu.
Car pour embarquer une batterie de 8,8 kWh (qui doit peser dans les 50 kg), une boite de vitesses, un moteur et un chargeur embarqué puissant, il faut sans doute faire un compromis sur le poids.
Je ne dirais pas que c’est une erreur. Mais quand même, c’est un critère à vérifier qui aura sans doute un impact sur l’usage auquel cette moto répondra.
Tout est dit dans son nom, qui est un maladroit mélange entre « Ampère » et « Scrambler ».
C’est donc une moto qui reprend les codes des scramblers, avec un guidon haut, une selle biplace, des pneus de tout-terrain et un look agressif. Sans compter tous les accessoires tels que le phare, les rétroviseurs et le pare-boue arrière.
Je n’ai donc pas mille commentaires à faire de ce design, que je trouve stratégique et objectivement réussi. Car même les plaques ajourées qui pourraient paraître cheap sur une autre moto donnent un effet d’authenticité à la EMGo Scramper.
Donc vraiment, rien de plus à dire.
En revanche, si cette évocation du style de moto adoré de Steve McQueen est stratégique, elle emporte avec elle un défaut : c’est que la moto scrambler est l’ancêtre du moto-cross.
C’est donc une moto tout terrain dans ses racines.
Or je ne veux pas trop m’avancer sur le poids de cette moto, mais je serais très étonné qu’elle pèse moins de 150 kg. Et si une moto tout terrain de 150 kg n’est pas forcément une aberration, ça la fait quand même rentrer dans la catégorie des motos lourdes.
À cette remarque, on pourra rétorquer que la Ducati Scrambler Desert Sled pèse plus de 200 kg.
Et on le fera avec raison.
Mais il faut se rappellera que le moteur de cette même Ducati développe 53,6 kW, soit presque 4 fois plus que la Scramper qui pèse à peine 50 kg de moins (ou peut-être pèse-t-elle presque 200 kg, qui sait ?).
On a donc de bonnes raisons de douter de la pertinence de la Scramper en tant que scrambler, c’est-à-dire en tout-terrain. D’autant que ses pneus ne laissent aucun doute, elle veut vraiment se présenter comme une moto off-road.
Alors voilà : la EMGo Scramper ne sera probablement pas la meilleure tout terrain du marché.
Et je me dis qu’il y a peut-être une erreur stratégique ici.
Car il suffirait de changer les pneus de la Scramper pour des pneus un peu plus orientés pour la route, et son usage serait beaucoup plus clair. Car ce faisant, elle répondrait parfaitement à l’usage navetteur (ou « commuter ») de nombreux motards.
Ici, ma mâchoire m’en tombe.
Car la Scramper est vendue à 5 480 € (6000$). C’est à peine 500 € plus cher que la TC Max, qui pourtant développe une puissance beaucoup moindre et est très bien positionnée en termes de prix.
C’est donc un exploit que réussit la Scramper, de se vendre à un tel prix. Un tel exploit que j’en finis par me demander comment ils peuvent tenir leur équation économique, étant donné qu’une batterie de 8,8 kWh coûte au moins 1 200 € aux constructeurs les mieux implantés.
Est-ce trop beau pour être vrai ?
Je n’en sais rien.
Mais ce que je sais, c’est que vous n’aurez jamais de meilleure moto électrique à ce prix, avant très longtemps. Alors si vous ne craignez pas de rouler sur une moto dont le constructeur aura fait faillite, ruez-vous sur cette moto : c’est une occasion en or.
Si la EMGo Scramper coûte si peu cher, c’est qu’il n’y a pas de secret : elle a fait des compromis.
Et puisque manifestement elle n’a pas fait de compromis sur les performances, c’est qu’elle en a fait sur l’impact environnemental. Tous ses composants doivent donc sans doute venir de Chine, où on fait de superbes composants pour pas cher, mais avec un impact écologique critiquable.
C’est ainsi, à chacun son sujet.
Et ça ne fait aucun doute, le sujet écologique n’est pas celui des Ukrainiens de chez EMGo.
Doit-on s’en insurger ?
Je n’en sais rien, car s’ils permettent de démocratiser la moto électrique qui est déjà en elle-même un léger progrès écologique, c’est toujours ça de pris. Mais hélas, ça ne suffira pas.
La conclusion que je tire de cette analyse est claire : c’est que la Scramper se positionne directement sur les plates-bandes des constructeurs chinois de motos électriques.
Et elle le fait avec un panache incroyable, car elle se paie le luxe d’être meilleure que les constructeurs chinois, en utilisant pourtant des composants qui viennent des mêmes usines.
Il ne me reste donc qu’à reconnaître que cette moto électrique est vraiment excellente.
Pas exemplaire, mais excellente.
Et pour cause : vous ne trouverez nulle part une moto électrique de 5 500 € qui monte à 120 km/h et garantit une autonomie de 150 km. Alors si elle vous tente, vous savez ce qu’il vous reste à faire !
Quant à moi, c’est l’analyse de cette moto me permet de revoir mes objectif à la hausse concernant mon premier modèle.
Car il sera bien difficile de venir concurrencer cette EMGo Scramper sur le terrain du prix. En revanche, je pense pouvoir faire beaucoup mieux d’un point de vue impact environnemental (en vérité, je l’ai déjà fait).
Alors si la conception d’un modèle de moto électrique plus respectueux de l’environnement que toutes les motos électriques du marché vous intéresse, inscrivez-vous à mon journal de bord.
Vous y découvrez mon premier modèle, au fur et à mesure de sa construction. Je vous retrouve de l’autre côté !
Note : après 3 ans de travail & une conception aboutie de mon premier prototype de moto électrique, j’ai décidé de stopper mon journal de bord. Vous pouvez néanmoins retrouver les archives de ce journal de bord en cliquant ici.
Mon adresse e-mail est publique, et vous pouvez m’écrire à tout moment. La voici : julien@construire-sa-moto-electrique.org. Vous pouvez également me contacter sur LinkedIn.
pour ceux qui veulent une vidéo pour comprendre ce que c’est : https://www.youtube.com/watch?v=9k3LOEcuMIg
Il a une vidéo ou il interview le CEO.
C’est peut-être chinois en parti, mais beaucoup Ukrainien simplement. Ils développent eux-même leur batterie et chaque cellule est réparable/remplaçable.
Voilà ! 🙂
Bonjour Florent,
Merci pour ce lien 🙂
bonjour,
Merci pour votre article, en complément je vous recommande cet essai lors d’un salon en Allemagne, visible sur youtube (sous-titré anglais) : « ScrAmper – ein ganz anderes Elektromotorrad. Aus der Ukraine. »
par Paddy Lectric. Son retour est très positif.
Récemment sur le compte Instagram officiel d’Emgo technologie, ils ont annoncés dans leur story, (il y a 2 jours) une augmentation de la puissance à 25kW.
Bonjour Allan,
Merci pour ce complément !
je reste un peu dubitatif sur deux points…
la puissance nominale est relativement faible… et finalement la crête n’est pas meilleure..
c’est la nominale… qui ne doit pas dépasser les 15 kW…
donc l’économie se fait clairement sur le moteur.
perso une 125 doit faire au moins 22 kW en crête au moins… sinon autant rester sur du thermique .
ensuite vous parlez de vitesse mais comment les commande t’on ?
parce que si c’est comme sur une moto 125 classic thermique au pied…
ça ne devrait pas intéressé justement pour ceux qui voudraient une 125 électrique plus simple
à l’instar d’un scooter avec variateur
22 kW en crête, c’est parfaitement légal aujourd’hui mais je ne pense pas que ça le reste trop longtemps.
Donc finalement, je trouve qu’ils ont fait le bon choix sur ça. Et ceux qui veulent plus de puissance passeront le A2 😉
Quant aux vitesses, j’imagine que c’est au pied oui, je crois voir le sélecteur.