Julien Vaïssette
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Que dire… La Tacita T-Cruise Urban est un non-sens.
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Pour choisir votre future moto électrique, la meilleure des solutions est de comparer tous les modèles. De prendre la Tacita T-Cruise Urban, et de vois ce qu’elle vaut face aux autres.
C’est ce que j’ai fait dans cet article, dans lequel je liste et classe toutes les motos électriques de plus de 11 kW (permis A et A2).
Et je peux vous avertir dès maintenant : la T-Cruise Urban de Tacita n’est pas très bien classée.
Tacita est un constructeur italien complètement lunaire de motos électriques.
Si on ne voit pas la mention de Turin, le site du constructeur donne l’impression qu’il vient tout droit de Chine, tellement il semble d’un autre monde. Il me fait penser au site délicieux d’Evoke Motorcycles.
Quoi qu’il en soit, la T-Cruise Urban est une moto européenne.
Et nous pouvons nous en féliciter, car voilà, c’est toujours bien de compter un européen de plus à la table. La suite, c’est de la regarder de plus près, pour savoir ce qu’elle vaut.
Mais dès qu’on regarde ses courbes ses caractéristiques, on va de surprise en surprise.
La première, c’est l’inadéquation évidente des deux termes qui composent son nom : Cruise et Urban. C’est déjà très étonnant, car en termes de motos, quand on parle de « cruise », on parle de longs trajets. Alors que jusqu’à preuve du contraire, on fait rarement de longs trajets en ville.
Mais passons, car nous y reviendrons plus tard.
La suite, c’est les caractéristiques. Ici aussi, nous tombons sur quelques surprises.
D’abord, la T-Cruise Urban se décompose en 3 puissances différentes : 27 kW, 34 kW et 44 kW (il y a 4 puissances disponibles en réalité, puisqu’on compte une équivalente 125 aussi).
C’est très étonnant comme diversité des puissances, car 27 kW correspond à une puissance de petite moto (250 cc environ), 34 kW correspond à une puissance de moto intermédiaire (500 cc environ) et 44 kW correspond à une puissance de moto un peu nerveuse mais pas si impressionnante (600 cc environ).
Cet éventail a assez peu de sens à mes yeux.
Car il est trop resserré pour justifier ces 3 choix (je veux dire, quelle différence entre 27 kW et 34 kW en pratique ?). Il est aussi trop vaste pour que chacun de ces 3 choix s’intègre avec cohérence à une même moto.
Très mauvaise idée donc.
Mais ce n’est pas tout.
Car si on a le choix sur la puissance du moteur, on a aussi le choix sur la capacité de la batterie. Et puisqu’ils n’ont peur de rien, ils passent du simple au double. On peut donc soit opter pour une batterie de 9 kWh soit pour une batterie de 18 kWh.
Si j’utilisais des émoji (dieu merci, je ne le fais pas), je crois que celui qui montre une tête qui explose illustrerait exactement ce que je ressens face à cette moto.
Je n’y comprends rien. La liste des caractéristiques ci-dessus est lunaire, et c’est exactement l’exemple à ne pas suivre.
Mais tout n’est pas à jeter !
Car quand on fait défiler la page de la T-Cruise Urban, on découvre qu’elle est équipée d’une boîte de vitesses à 5 rapports.
Très intéressant.
J’ai en effet fait le calcul du gain de performances et de consommation qu’une boîte de vitesses offre, et c’est très significatif.
Donc sur ce point, bravo à Tacita.
Nul doute que si on regarde plus en détail les caractéristiques d’autonomie et d’accélération, on pourra voir avec fracas l’apport de cette boîte de vitesses.
Ah, non. En fait, non.
Car l’autonomie est de 220 km si on prend le pack de 18 kWh et de 112 km si on prend l’autre pack. Ce n’est pas beaucoup plus que ce qu’on trouve chez les motos électriques, qui ne sont pourtant pas équipées de boîtes de vitesses.
Concernant l’accélération, c’est encore pire : on n’a pas l’information.
On ne connaît donc pas le temps que la T-Cruise Urban met pour franchir le 0 à 100 km/h. Ainsi, le seul point fort évident de cette moto n’est plus si évident. Décidément, ils n’ont pas fait fort.
Peut-être que le design rattrapera le coup ?
Si on compare les performances du modèle le plus puissante de la T-Cruise Urban avec celles des autres motos électriques routières, elle obtient la note de 1,18/5.
La T-Cruise Urban est un cruiser à l’américaine. Et de ce point de vue, ça colle parfaitement avec la première partie de son nom : « T-Cruise ».
Du reste, elle n’est quand même pas très jolie. Je la trouve trop ronde, et en même temps trop monolithique.
Il n’y a aucun travail sur les vides, les textures sont lisses et le volume global n’est pas si réussi.
Elle n’est pas moche pour autant, mais si on la place à côté de la Vulcan S de Kawasaki ou de la Indian Scout Bobber, elle sera franchement ridicule.
Sa note : 2/5.
Concernant son usage, ce n’est pas joyeux non plus.
Car même si on ne connaît ni son poids ni sa géométrie (ce qui n’est vraiment pas sérieux par ailleurs), elle semble énorme. Et une moto énorme, ce n’est vraiment pas fait pour la ville.
On désamorce déjà immédiatement la deuxième partie de son nom, « Urban », qui semble complètement hors-sujet.
Mais elle ne sera pas non plus la meilleure pour cruiser à côté des Indians sur les routes américaines, à cause de son autonomie très maigrichonne.
220 km, c’est bien pour la ville, mais c’est vraiment trop peu pour les longues lignes droites. Il n’y a qu’à voir le documentaire sur la Livewire et Ewan McGregor pour s’en convaincre.
C’est bien d’avoir essayé mais encore une fois, ce n’est pas vraiment réussi.
La note de sa capacité à répondre à un usage routier : 2/5.
On en vient au vrai cauchemar de cette moto : son (ses) prix.
Etant donné qu’elle existe sous plusieurs versions, son prix est illisible. Tenez, jugez par vous-même :
Autrement dit, la T-Cruise Urban coûte entre 11 695 € et 19 252 €. Presque du simple au double.
Et qu’on vienne me dire que c’est une seule et même moto.
Du reste, elle n’est pas si chère pour une moto électrique. Ça lui fait toujours un bon point.
La note du prix du modèle le plus puissante comparé à celui des autres routières électriques : 2,89/5.
La cerise sur le gâteau, c’est l’empreinte environnementale de la Tacita T-Cruise Urban.
Elle est exactement à l’image du reste de la moto : pas terrible.
Elle est en effet équipée d’une batterie au lithium-polymère, qui est certes mieux que la lithium-ion classique, mais elle n’en reste pas moins truffée de cobalt et de nickel. Et on sait à quel point c’est une mauvaise idée.
Quant au moteur électrique, c’est un moteur brushless.
Et comme pour la batterie au lithium, le moteur brushless est la solution unanimement utilisée chez les motos électriques.
Et comme pour la batterie au lithium, il souffre de nombreux défauts environnementaux causés par la présence de terres rares qui représentent une sorte de désastre social, géopolitique et écologique de haut niveau.
La note de sa piètre performance environnementale : 2/5.
Une moyenne générale médiocre de 2,02/5.
Malheureusement, la T-Cruise Turismo (sa cousine) ne fait pas mieux.
Alors je n’ai rien à ajouter.
Ah si. Tacita ferait mieux de se concentrer sur sa gamme T-Race, dont les modèles sont bien meilleurs.
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